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jardin médiéval
Ceint de murailles et de tourelles, le jardin médiéval renvoie à la symbolique du jardin d’Eden, lieu de loisir et d’agrément, paradis terrestre symbolisé par la présence d’arbres.
Pénétrant dans le jardin, le premier auteur du roman de la Rose :
« Lors entré, sans plus dire mot
Par l’uis que Oisseuse overt mot
Ou vergier et quant je fui ens
Si fui lié, et baus et joiens ;
Et sachiés que je cuidai estre
Por voir en paradis terrestre
Tant estois li leu délitables » (Ed Poirion v 631-637)
Le Roman de la Rose (1237-1280),
Lui, au centre du jardin devant la fontaine aux Roses
Par son caractère intime, le jardin est le refuge de l’amour courtois où l’amant dans un acte spontané de soumission, offre son cœur à sa dame. Il peut aussi avoir un caractère allégorique, jardins d’orgueil dénotant la puissance territoriale d’un seigneur.
L'offrande du coeur
musée de Cluny
la théséide de Vienne, Boccace, bibliothèque nationale de Vienne
folio 53 r : Emilie dans le jardin observée par Arcitas et Palamon
Mais il prend plus fréquemment la forme d’un potager ou d’un verger, avec arbres, taillis et fontaines – remplissant en ce sens une fonction utilitaire.
Que ce soit dans sa variante seigneuriale ou monastique, le jardin est un lieu où l’on cultive des plantes qui sont répertoriées : dans l’article 70 du capitulaire de Villis, Charlemagne indique quelles sont les 89 herbes et plantes qui doivent être cultivées dans ses domaines. De sont côté, le plan de l’abbaye de Saint-Gall indique que le jardin des plantes médicinales était composé de 16 plantes tandis que je jardin potager en comprenait 18.
Ressuciter les herbiers du passé
Depuis les années 1980, de nombreux jardins médiévaux ont été créés en France comme le jardin du musée de Cluny ou celui du musée de Salagon en haute-provence qui regroupe 300 espèces de plantes dont celles recensées dans le capitulaire de Villis. Le jardin se distribue en trois espaces : le potager, les carrés médicinaux et le jardin floral. On observe également quelques parterres thématiques suivant les pharmacopées du Moyen-Âge : le parterre 11 rassemble les « herbes des fièvres ». le parterre 13, « les plantes des femmes », le parterre 15, « les vulnéraires ».
musée de Salagon
parvis de la cathédrale de Chartres
parvis de la cathédrale de Chartres
parvis de la cathédrale de Chartres
parvis de la cathédrale de Chartres
Icare : quête infinie, grande déconvenue
Labyrinthe
synthèse ptoléméenne : la mappemonde de Fra Mauro
Mappemonde (1459), Biblio Nazionale Marciana, Venise
pour y voir plus clair, lire la reception de la géographie de Ptolémée en occident au XVème siècle :
caliméro : héliocentrique, always alone?
Calimero, né coiffé, tu choisis encore de rester au centre où tu peux toujours croire au sens de la mesure. Tu hésites toutefois aujourd’hui entre le soleil et la lune : allégeances incertaines. Demain est un autre jour.
Nos âges..irrésolus ? Deviens ce que tu es. Déroule ton projet. Poses ton regard sur le rivage. La mer ondule. Tu peux l’écouter. Elle ne te retiendra pas.
Petite coquille d’œuf aimée de la voie lactée, tu seras peut-être cartographe, ouvrant le chemin vers d’autres cieux, délimitant les eaux, dessinant jardins, bois et bocages, aventureux, le regard fixé vers le lointain. Dans ces contrées inconnues, tu rencontreras peut-être un jour les premiers hommes vivant sous des lois justes, achevant ainsi de construire ton paysage intérieur.
Ton paysage vallonné et boisé, parcouru par un cerf-au-bois-volant, s’est ouvert. Il s’ancre dans la terre, solide, incarnée, silencieuse.
peintures-évenement, haut scandale, ô réjouissance
Dans son ouvrage intitulé le scandale dans l’art, Pierre Cabanne explique que le scandale n’est pas nécessairement le fait d’agitateurs, de révolutionnaires, d’extrémistes asociaux », les artistes y participent également. L’œuvre d’art est également susceptible de remettre en question l’équilibre de la société, l’ordre établi et la morale acquise. Elle semble ainsi concourir à la contestation sociale, faisant avancer l’art pour certains, marquant son échec pour d’autres. Dans biens des cas toutefois, la passion suscitée au sein du public et des critiques ne doit rien à une quelconque intention préméditée de l’artiste. Il reste que l’étonnement, la passion, la surprise ou l’indignation ont quelconque chose de fécond en étant à la source d’une interrogation renouvelée sur le sens de l’art, des choses et même de la vie.
Visitons quelques œuvres majeures au gré d’une flânerie au cours des siècles pour mesurer l’ampleur et la profondeur du scandale, loin de la doxa pour laquelle il faudrait s’écrier : malheur à l’homme par qui le scandale arrive.
Peinture celibrissime de Véronèse faisant écho aux noces de Cana à la composition architecturale monumentale à l’antique inspirée de Venise, le repas chez Levi (1573) a d’abord été nommé la Cène en référence au tableau de Léonard de Vinci. Les contemporains se sont demandés si cette peinture représentait la trahison de Judas ou l’eucharistie. Dans un climat difficile marqué par la contre-reforme, Véronèse a été soumis à la question : que signifiaient donc les hommes armés représentés sur son tableau ? Qui avait assisté à la cène selon lui ? Véronèse : « nous les peintres prenons des libertés comme les poètes ».. »Je crois que le Christ était accompagné de ses apôtres », mais dans la mesure où il restait de la place, je l’ai remplie de figures comme on me l’a commandé.
Dans ce possible auto-portrait du maître, on peut voir le scandale de la carnation. Echo irresistible au petit bacchus à la posture provoquante, la peau transpirant une sueur verdâtre inconvenable.
En représentant la mort de la vierge (1605-1606) déclinaison de la dormition, le peintre nie l’assomption, scandale religieux amplifié par la rumeur d’une pêche non moins miraculeuse, celle du modèle, le cadavre d’une prostituée dans les eaux du Tibre. Un blasphème.
La ronde de nuit de Rembrandt (1642) a été commandée par la compagnie des arquebusiers. Selon les canons de l’époque, on s’attend à une représentation égalitaire des commanditaires. Le peintre n’a pas respecté ce principe, faisant également le choix de représenter des personnages presque en déroute dans l’incapacité de maîtriser leurs coups de fusil. En prenant cette liberté, Rembrandt perd la confiance des commanditaires, la bourgeoisie de son temps.
La maja vestida de Goya (1800) ne serait en rien sulfureuse si elle ne faisait écho à la maja desnuda alors que le nu est interdit en Espagne par l’inquisition.
Autre scandale autant pictural que politique le radeau de la Méduse de Géricault (1819) marque les esprits. Au-delà du fait divers, celui d’un naufrage et de l’abandon de passagers à leur triste sort, La Méduse incarne le scandale des corps étendus, de la chaire exposée, des cadavres en décomposition. Sur le plan technique, le style tourmenté et sombre de Géricault ne plaît pas aux critiques et au public. Et puis, il y a peut-être aussi de la part de l’artiste une critique humaniste sous-jacente. Pour Michelet, Géricault peint son radeau et le naufrage de la France. Il navigue seul, poussé par l’avenir…c’est une allusion à la fin de la politique coloniale de la France. En effet, au sommet de cette composition pyramidale, un homme noir fait signe vers le lointain (secours en vue) au lieu d’être en fond de cale, faisant signe d’une aspiration à l’égalité des races. Géricault n’a certainement pas été insensible aux débats de fond qui divisent la societé française sur cette question alors que s’affirme le mouvement pour l’abolition de la traîte.
Pour Courbet, le scandale est une posture : « pour se faire connaître, il faut du scandale, le jour où je ne serai plus contesté, je ne serai plus important ». Dans un enterrement à Orans, Courbet choisit de peindre une scène rarement représentée, une scène de vie à la manière hollandaise sans la sublimer comme il aurait été d’usage. La composition est marquée par un trou béant au centre qui signifie la finitude de la vie. Pour les contemporains, les personnages peints par Courbet sont laids. Ils scandalisent pour cette raison. On y voit aussi des socialistes, catégorie politique et sociale honnie par la bourgeoisie commanditaire qui ne se reconnait pas dans ce tableau.
Le tableau intitulé les demoiselles des bords de Seine (1856) est surnommé le scandale des scandales par la critique pointant le procès de la prostitution (les deux femmes représentées sont en effet des prostituées) qui choque la morale bourgeoise.
Dans la baigneuse (1853), le traitement de la chaire rappelant Rubens est loin du nu académique et provoque le scandale de la laideur amplifié par celui de la morale (la servante regarde a maîtresse avec désir). Pour Courbet il faut voir et peindre les corps tels qu’ils sont, avec réalisme.
Dans la même veine, le déjeuner sur l’herbe de Manet (1863) s’inscrit dans la tradition du concert champêtre de Titien. Le nu domine. La prostitution en filigrane.
Impression au soleil levant de Monet est considéré par les critiques comme une œuvre inachevée car produite par touches successives. Le bleu domine avec quelques tâches orangées, en contrepoint. Au centre, on peut voir une barque noire. Choix de couleur osé. Selon le traité des couleurs de Chevreuil, le noir n’étant pas une couleur, il doit être banni de la palette du peintre. Mais pour Monet le noir est la décomposition d’un faisceau lumineux et doit avoir sa place dans son œuvre.
Quand Rodin expose l’âge d’airain, la critique et le public crient au scandale de l’imposture. Rodin s’est inspiré de l’antiquité (Théogonie d’Hésiode) pour donner la vie à son œuvre au point que le peau de la statue semble presque palpable. Pour les critiques, refusant de reconnaître le talent de l’artiste, la statut résulterait d’un moulage sur corps.
En réalisant la fontaine (1917), Marcel Duchamp a choisi d’illustrer un sujet trivial. Les contemporains y voient à juste titre un urinoir. Duchamp y voit la prédominance du concept. Le peintre a en effet le pouvoir de dire que ce qu’il fait est de l’art. Le pouvoir du concept de l’art est plus grand que celui de la réalisation. C’est au public de rendre l’œuvre artistique. Celle-ci doit en tant que telle être exposée dans un espace culturel.
LHOOQ, Joconde à moustache répond à une réflexion sur le statut de l’art, la Joconde, est devenue un mythe au point que l’on ne la regarde même plus. Marcel Duchamp cherche à la démystifier.
Avec la merda d’artista de Piero Manzoni (1961), on comprend que plus c’est scandaleux, plus c’est cher. In fine, on peut vendre ce que l’on veut.
Henri IV. Figures du pouvoir, échanges artistiques
Encore une année de célébration et non des moindres, celle des 400 ans de la mort d’Henri IV…C’était un 14 mai 1610…il y a quatre cent ans.
Cette semaine a été marquée par un colloque universitaire sur ce souverain majeur qui s’est achevé par une journée au Louvre consacrée aux arts aux temps d’Henri IV, prince de paix et mécène des arts. La matinée était consacrée au peintre anversois Jérôme Francken connu pour l’adoration des bergers (1585) conservée dans la cathédrale Notre-Dame de Paris, au peintre Martin Fréminet dont le nom est fréquemment cité par les contemporains aux côtés de ceux Michel-Ange et de Rubens ainsi qu’aux amours de Théagène et Chariclée, une série de quinze tableaux exposés dans la chambre ovale du château de Fontainebleau, dans laquelle Marie de Médicis a donné naissance au dauphin, le futur Louis XIII. Le traitement du sujet confié au peintre Ambroise Dubois est tiré des Ethiopiques d’Héliodore d’Emèse, un roman grec du IVème siècle. Au délà de l’engouement pour un roman à la mode, le traitement thématique repose sur des motivation symboliques et politiques. Chariclée dont le nom signifie gloire et grâce associée à la lune est le double d’Artémis. Théagène, de naissance divine est à l’image d’Apollon.
Théagène et Chariclée
les visages et les corps au Louvre: carte blanche à Patrice Chéreau
Exposition de Patrice Chéreau conçue avec Sébastien Allard, Vincent Huguet
Scénographie : Richard Peduzzi
Après Pierre Boulez et Umberto Ecco, Patrice Chéreau a reçu carte blanche pour mettre en scène le Louvre.
« Etre l’invité du Louvre, qu’est-ce que cela signifie ? La réponse est sans doute différente pour chacun : être un « grand » programmateur, un maître de cérémonie, un visiteur particulier ? Au cinéma, au théâtre ou à l’opéra, mon métier est de mettre en scène, de faire apparaître un corps dans un espace, d’éveiller un visage pour qu’il nous raconte une histoire. Au Louvre, il en sera de même : j’assimile le travail que j’y prépare à une œuvre, une mise en scène, un opus unique tel une nouvelle tétralogie, un nouveau Peer Gynt, une nouvelle Reine Margot. Elle s’appelle cette fois-ci Patrice Chéreau au Louvre, mais son vrai titre : les visages et les corps. »
L’exposition de Patrice Chéreau rassemble 40 œuvres de Courbet, Titien et Bacon ainsi que des photos de Nan Goldin issues des collections du Musée du Louvre, du centre Georges Pompidou, du Musée d’Orsay. Une mise en scène toute en émotions appuyées sur un jeu de correspondances infini entre les êtres figurés autour de chefs d’œuvre comme l’homme au gant de Titien, le Christ mort de Philippe de Champaigne, l’origine du monde de Courbet, le portrait de Michel Leiris de Francis Bacon et d’autres œuvres moins connues.
P. Chéreau veut faire partager au spectateur son approche de l’art et de la vie et établir des correspondances avec les spectacles mis en scène également au Louvre, en particulier la pièce de Jon Fosse, rêve d’automne.
Quels corps et quels visages nous sont révélés? Ceux du désir, de la mort, de l'amour ou de la souffrance? De l'attente?