abondance et faim : nourritures divines dans la quête du Saint Graal
"Au repas du soir, tous les compagnons de la Table Ronde étaient assis à leurs places : soudain un coup de tonnerre retentit, si violent qu’il ébranla le palais, et un rayon de soleil entra dans la salle, sept fois plus clair que la lumière du jour. Les assistants se regardèrent, mais aucun n’avait le pouvoir de parler. Et sur le palais un silence surnaturel régna. Alors le GRAAL entra, voilé de soie blanche, porté par des êtres invisibles. Il vint par la grand’porte, et le palais s’emplit aussitôt de senteurs, comme si tous les parfums du monde s’y fussent répandus. Puis il alla par la salle et tourna autour des hautes chaires. A mesure qu’il passait, les convives voyaient les tables se charger devant eux de leurs mets préférés, sans qu’aucun valet y mît la main. Quand tous furent servis, le Graal disparut et les convives purent de nouveau parler. Le roi Artus rompit le silence pour remercier Dieu d’une telle grâce. Sire, dit alors Gauvain, il est vrai que ce miraculeux festin n’a jamais eu lieu nulle part, si ce n’est, à ce qu’on dit, au château de Corbenic. Mais ici nous n’avons pas vu clairement le Graal. C’est pourquoi, Sire, je fais ce vœu. Demain, sans plus attendre, j’entreprendrai la Quête du Saint Graal ; j’y resterai un an et un jour, et plus s’il le faut, mais je ne reviendrai pas à la cour avant d’avoir contemplé le Vase merveilleux, ou avant d’avoir appris que cet honneur m’est interdit. A ces paroles, tous les chevaliers se lèvent, acclament Gauvain et font le même vœu."